Le vieillissement de la population pose des défis majeurs, mais aussi des opportunités inédites. Une enquête menée par PageGroup et France Silver Eco, auprès de près de 5 000 participants (salariés, retraités et dirigeants) français, met en lumière les grandes questions autour de l’emploi des seniors, de la formation, des fins de carrière, et du rôle souvent invisible des aidants. Avec des leçons importantes pour la Belgique.

Une population active en mutation

D’après l’Insee, d’ici 2025, les 50-64 ans représenteront 35 % de la population active. Pourtant, selon la DARES, seulement 56 % des seniors de cette tranche d’âge sont actuellement en emploi. Ce décalage interpelle : il reste une part significative de carrière à accomplir après 50 ans, mais les stéréotypes liés à l’âge freinent encore l’accès à l’emploi et à l’évolution professionnelle.

Comme le souligne Laurent Blanchard, Regional Managing Director de PageGroup France, il est impératif de valoriser les compétences uniques des seniors : « Ils constituent un vivier de talents trop souvent sous-estimé, en dépit de leur expertise, de leur adaptabilité et de leur capacité à transmettre des savoirs. »

Les seniors, victimes de biais persistants

Les chiffres parlent d’eux-mêmes :

  • Un salarié sur deux déclare avoir été discriminé en raison de son âge lors d’un processus de recrutement.
  • 71 % des sondés identifient l’âge comme le principal obstacle à retrouver un emploi.

Ces perceptions négatives s’accompagnent d’inégalités dans l’accès à la formation. Un quart des salariés de plus de 50 ans n’a suivi aucune formation au cours des deux dernières années, malgré son importance pour maintenir l’employabilité et favoriser l’épanouissement professionnel. Un problème connu depuis plus de 20 ans.

Pourquoi ? Plusieurs études en ont souligné les causes, tout au long des années 2000 et 2010. Les chercheurs et chercheuses s’accordent à dire que ces inégalités dans l’accès à la formation s’expliquent par une combinaison de facteurs. Les stéréotypes liés à l’âge jouent un rôle central : les employeurs hésitent parfois à investir dans les seniors, perçus à tort comme moins enclins à apprendre ou proches de la retraite. 

En parallèle, les salariés eux-mêmes peuvent se sentir exclus des opportunités de développement, soit par méconnaissance des dispositifs existants, soit par auto-censure. S’ajoutent à cela des contraintes organisationnelles, comme une charge de travail élevée ou des formations mal adaptées aux besoins et disponibilités des seniors. 

Pourtant, la formation est essentielle pour les aider à s’adapter aux évolutions du marché du travail, tout en valorisant leur expertise et en renforçant leur sentiment d’appartenance à l’entreprise. 

Pourtant, il s’agit là d’une nécessité absolue en matière de travail. La Finlande en a fait l’un de ses piliers lors de sa réforme des fins de carrière au tournant du 21ème siècle, ce qui a permis de booster l’emploi des 50+. En France et en Belgique, c’est tout un chantier qu’il faut encore lancer.

Réinventer les relations intergénérationnelles

Le dialogue intergénérationnel apparaît comme une solution clé pour lever les stéréotypes liés à l’âge. Contrairement à certaines idées reçues, les seniors sont particulièrement ouverts au partage de connaissances et aux échanges avec leurs collègues plus jeunes.

Cependant, des disparités subsistent :

  • 80 % des salariés et 71 % des dirigeants estiment que travailler avec des générations plus jeunes est facile.
  • Les moins de 40 ans se montrent souvent les plus réticents à ces échanges.

Malgré l’intérêt manifeste des entreprises pour le sujet, un tiers des dirigeants n’a pas encore mis en place d’initiatives concrètes pour favoriser les relations intergénérationnelles, essentielles au transfert des savoirs, à l’innovation et à la cohésion d’équipe.

L’accompagnement des aidants : une urgence croissante

Le vieillissement démographique amplifie une réalité peu abordée : le rôle des aidants familiaux. En France, un salarié sur quatre sera aidant d’ici 2030, selon l’AGIRC-ARRCO. Pourtant, 63 % des salariés aidants affirment que leur entreprise n’a mis en place aucune politique spécifique pour les soutenir.

Ces travailleurs jonglent entre leurs responsabilités professionnelles et familiales, souvent au prix de leur santé. Offrir des aménagements horaires ou des dispositifs d’accompagnement devient une priorité pour construire une société inclusive, comme le souligne Luc Broussy, Président de France Silver Eco : « Les entreprises doivent reconnaître et valoriser ces salariés, car ils jouent un rôle essentiel dans la société du ‘bien vieillir’. »

S’engager pour mieux vieillir

La transition vers la retraite peut être perçue comme un défi. Maintenir une activité professionnelle ou associative offre une alternative précieuse, en favorisant la socialisation, l’autonomie et la santé mentale.

  • 87 % des salariés pensent que ces activités prolongées ont un effet positif sur leur bien-être.
  • Un retraité sur deux voit dans l’engagement associatif une opportunité pour mieux appréhender cette étape de vie.

Une responsabilité partagée

Cette étude le montre clairement : le vieillissement actif ne se résume pas à des chiffres ou à des politiques publiques. C’est un enjeu sociétal qui interpelle autant les employeurs que les décideurs politiques. Les seniors ne sont pas un poids, mais une ressource. Reconnaître leur valeur et leur offrir des conditions propices à leur épanouissement est un investissement pour l’avenir.